En ce 30 mai où il fête son anniversaire, j’ai voulu faire un clin d’oeil spécial à ce gars-là. Momo le mérite amplement, car il a un coeur gros comme ça, comme on dit. D’autres merveilles sont bien sur à venir… Stay Tuned! Sweet Birthday, blessed!
Momo Kankua possède une vieille âme dans un corps de jeune. Du coup, il en a à raconter. D’où la discipline choisie, le slam, pour nous dessiner sa vie, ses blessures, ses peines, ses joies, ses combats.
C’est à l’âge de 19 ans que Momo découvre le slam au centre culturel français de Lomé (aujourd’hui Institut Français du Togo), en 2009. Mais bien avant cela, le jeune togolais a toujours écrit. D’abord avec son père, avec qui Kankua, comme l’appelle sa grand-mère, entretenait une relation forte de discipline mais aimante, peu avant son décès. Puis seul par la suite, des poèmes et des textes en tout genre, pour lui-même.
Né à l’hôpital de Bè d’une mère au caractère de guerrière, qu’il considère comme sa béquille, Komla Mawuli KLUTSE NANE grandit à Adidogomé. « Nous étions parmi les premiers habitants d’Adidogomé. Ce n’est pas comme aujourd’hui où le quartier est développé, avant il n’y avait rien. Les serpents passaient dans la maison et papa les tuait » se rappelle-t-il.
Encore enfant, il perd sa complice de toujours et sœur Lilly, sa première grande défaite de vie, lui qui les a en horreur. Depuis lors, l’homme se décrit comme quelqu’un « qui a toujours été seul », avec la sincérité qui le caractérise. A la maison, il reste le seul enfant, parmi les adultes. Sa maturité et son indépendance viennent rapidement, par la suite. Il fait ensuite la série D, pour devenir pharmacien, comme le souhaite son père, malgré son aversion pour les études. Fin observateur, ce sera finalement l’anthropologie, puis le slam.
Pour Momo, qui découvre la discipline oratoire par hasard, alors qu’il se rend à la bibliothèque, cet art s’est imposé à lui comme une évidence. Une seconde nature. Une chance aussi, de pouvoir s’exprimer devant un public. « L’évènement avait été organisé par Ap’nondas et Askmarou à l’époque. Je me rappelle d’avoir vu cet art comme un moyen magique de pouvoir exprimer ce que l’on ressent devant un public » se remémore t-il.
Momo organise alors son 1er « Bissap Philo et Slam », en Janvier 2011, un concept nouveau autour du slam et des livres, au centre culturel Mytro Nunya. Viennent dans la foulée plusieurs scènes slam chez lui à Lomé, puis sur le continent au Burkina-Faso, au Mali, au Bénin, en France, au Niger, au Ghana et au Tchad. Avec son public, il est toujours généreux. Pudique, aussi. Voir trop humble. Cet amoureux de la culture aime aussi être entouré, tout en chérissant sa solitude. C’est pourquoi vous le verrai souvent porter sa casquette d’organisateurs d’évènements.
Depuis lors, Momo Kankua a organisé d’autres événements slam comme « Pot &Zik », « Slam’uzik » et le festival « FafaSlam Parole de Paix », pour faire la promotion des langues africaines et de la paix. Dans l’ambition de faire grandir le slam, il initie également la « Journée Internationale du Slam », qui se déroule, depuis 2017, tous les 29 Avril, dans plusieurs pays du monde. Il est aussi le vice-président du comité d’organisation de la Coupe d’Afrique du Slam. Là, son don de rassembleur s’exprime pleinement.
Autant Momo est calme sur scène, car elle l’apaise, autant il bouillonne dans la vie. Lorsque vous l’entendez, vous savez que le jeune homme est né pour sortir ce qu’il porte dans le coeur. « J’ai envie que quelque chose se passe ». D’ailleurs, il nous prépare un certain nombre de projets, toujours en lien avec sa discipline phare, mais pas seulement. Son 1eralbum slam « Soizic » est en préparation. Ainsi que d’autres surprises.
Momo Kankua est aussi un artiste engagé dont l’âme saigne. Saigne pour son pays en crise. Militant de la 1ere heure, il n’hésite pas à exprimer ses opinions. Pour le slameur, il y a trop d’injustices que le slameur ne comprend pas. Ne tolère plus. N’a jamais toléré, au fond. « Est-ce qu’il y a quelque chose qui va dans ce pays anormal ? Des amis à moi sont récemment morts, faute de soins rapides et adéquats, c’est normal, ça ? Nous ne vivons pas ici, nous survivons en oubliant trop souvent le côté humain ! », relate-t-il, profondément heurté.
Au plus fort de la crise politique togolaise de 2017, ces propos et notamment sa vidéo sur la chaîne Youtube « Les Haut-Parleurs » lui valent des menaces et intimidations. Tout comme pour son père, à son époque. Momo se rappelle. «Si je ne faisais pas cette vidéo, je me serai trahi, moi et mes convictions profondes. Au moins, je mourrai digne ! »
C’est aussi cela que ses textes racontent. Ils sont puissants. Ils sont précis. Ils sont perturbants. Ils sont lui. Momo Kankua. Pour cet addict des mots qui n’aimait pas l’école, la discipline qu’il manie aujourd’hui sonne comme une revanche. Celle du petit garçon solitaire qui a trouvé sa place et son mode d’expression via son art : le slam.
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