Depuis 2017, un nouveau bouillon de cuisine est venu à la rencontre de vos papilles. Il s’agit du bouillon AFRICUBE, élaboré par la jeune entreprise agroalimentaire d’Ayité Ajavon (AHOENOU Sarl). Un beau pari lorsqu’on sait, que ce produit est vendu au même prix que la concurrence sur le marché togolais où il est né, qu’il est cent pour cent naturel et élaboré à partir d’ingrédients locaux. Rien à voir donc avec les bouillons habituels qui contiennent du glutamate, d’énormes quantités de sel (au moins 50%) et autre exhausteur de goût qui inondent ce marché. Zoom sur cette nouveauté bonne pour votre santé et qui en fera saliver plus d’un.
Selomcrys : Qu’y a-t-il de si différent dans le bouillon culinaire Africube ?
Ayité Ajavon : Africube est naturel, sans aucun arôme artificiel et tout est produit localement. Il est pour l’essentiel composé de soja, d’oignon, de gingembre et d’afiti (moutarde de Néré). L’Afiti se présente sous la forme d’une pulpe jaune et ses graines sont noires : c’est le produit star d’Africube. C’est un élément très nutritif, très utilisé dans le Sahel, il s’agit du bouillon authentique africain aujourd’hui un peu délaissé avec l’arrivée des cubes industriels. Je veux revaloriser l’afiti, c’est comme le beurre de Karité qu’on a valorisé aujourd’hui en parlant de ses vertus et que l’on retrouve utilisé partout par les grands groupes de produits cosmétiques.
Selomcrys : Comment l’idée est-t-elle née ?
Ayité Ajavon : Je voulais rentrer au pays et y créer de la richesse. Avant cela je vivais à New York où je travaillais dans l’évènementiel puis en France comme chef de projet informatique dans le secteur bancaire. Je ne voulais pas rester dans ce domaine d’activité car c’était un « job alimentaire ». Par hasard, j’ai lu une publication sur Facebook sur « les dangers des cubes Maggi » ; j’ai fait mes recherches qui confirmaient leur dangerosité pour la santé et je me suis alors posé des tas de questions. Pourquoi consommons-nous des cubes qui viennent de l’extérieur, non consommés par les populations dont sont issus ces grands groupes de l’agroalimentaire, et qui sont visiblement mauvais pour la santé, et massivement utilisés par les Africains dans leurs sauces. Et on nous répète même sans cesse, publicités à l’appui, que sans ces cubes, nos sauces ne sont pas gouteuses, il y a un problème selon moi ! C’est comme si nous Africains, venions expliquer à un vigneron bordelais comment réussir son vin ! Le souci majeur que nous pointons est le glutamate, qui est un exhausteur de goût, et modifie le goût de manière artificielle et donne un message à ton cerveau qui t’indique que c’est bon. Le glutamate éteint de plus le mécanisme de satiété donc favorise l’obésité, le diabète etc. En occident c’est ce qu’il y a dans les fast-foods, les burgers, les pizzas, les sauces type mayonnaise.
Selomcrys : Tu as lancé ton entreprise sans aucun appui extérieur traditionnel, n’est-ce pas un challenge trop ardu ?
Ayité Ajavon : Le problème avec les banques par exemple, c’est qu’il faut souvent venir avec un produit fini et démarrer avec les économies pour prouver que l’idée est viable. Elles ne veulent prendre aucun risque, sans jauger de votre notoriété. Nous avons donc débuté au marché en achetant le néré à des revendeuses, aujourd’hui nous travaillons avec les femmes qui nous en fournissent plus régulièrement contre une rémunération stable. Il faut être vigilant car c’est un produit facilement assimilable au soja pour les non connaisseurs. Or le soja coûte moins cher. Le néré demande plus de temps, du soleil, du travail c’est tout un processus. Nous voulons protéger le consommateur donc nous voulons des produits authentiques.
Selomcrys : Sur quoi repose ton business model ?
Ayité Ajavon : Mon business model repose sur le volume, ce n’est donc pas pour me rendre riche c’est pour rendre riche tout le monde… Nous avons fait appel à une ONG qui travaille avec des groupements de femmes, surtout au Nord et au Centre du Togo. Chaque femme qui nous fournit du néré est prestataire, elles s’organisent chaque mois elles ont un revenu qu’elles dépensent dans leurs communautés et elles ne descendent plus en ville ou à Lomé. Elles vivent chez elles et de leur travail. C’est une grande fierté personnelle pour ces femmes.
Selomcrys : Tu n’es pas un peu un ovni dans ce domaine auquel tu ne connaissais rien, en débutant…
Ayité Ajavon : Je ne connaissais rien en marketing, c’est vrai, par contre, j’ai travaillé dix ans dans l’évènementiel à New York avant de devenir chargé de projet informatique, et mon expérience de consommateur m’a beaucoup servi également ! J’ai écumé les marchés et effectué deux ans de recherche et de développement avant de rentrer m’installer à Lomé. J’ai osé me lancer après beaucoup d’années de travail car je crois en mon produit. Je vous propose une alternative saine tout en un, car nous n’avons plus l’expertise ni le temps qu’avaient nos mamans pour cuisiner. De plus, le sachet de bouillon est à 25 frs CFA (le même prix que les autres cubes !)
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Selomcrys : Tu t’attaques tout de même à de gros concurrents…
Ayité Ajavon : Selon les chiffres, l’Afrique consomme jusqu’à 100 millions de cube Maggi par jour et l’année dernière, 65 milliards de cubes Maggi ont été vendus, sans parler des autres marques qui existent ! Le continent compte une multitude d’usines qui en fabriquent donc nous ne jouons certainement pas dans la même cour. Je propose une alternative plus naturelle et saine, libre au consommateur de choisir ! C’est un challenge pour moi… l’éléphant lorsqu’il voit la fourmi, c’est qu’elle a bien grossi. Lorsque cela m’arrivera, je serai sans doute passé à autre chose.
Selomcrys : Que voudrais-tu que l’on retienne d’Africube ?
Ayité Ajavon : Nous avons fait un effort sur le packaging, le prix mais surtout sur le goût ! C’est un produit made in Togo, c’est vrai, mais je veux qu’il soit plébiscité parce qu’Africube est bon et non uniquement parce que c’est un produit local. Je veux que les gens l’achètent parce qu’ils l’aiment. A la fin, le bonus, c’est que c’est naturel, c’est togolais donc tu fais travailler tes frères et sœurs et l’argent tourne entre nous. En tant qu’homme d’affaire, à moi de trouver la solution au problème que je pointe ! Ne mangez plus de glutamate, car, au même prix, voici une alternative de meilleure qualité.
Selomcrys : Quel bilan tires-tu de cette aventure aujourd’hui ?
Ayité Ajavon : Je suis fier d’en être arrivé là car nous avons écoulé plus d’un million d’unités sans aucune publicité. Nous sommes togolais, la nourriture c’est très important dans notre culture. Alors, lorsqu’un ami te dit que ton cube est bon c’est une chose, mais lorsque les bonnes dames du marché l’affirment aussi, là c’est autre chose… (Sourire) Nous avons beaucoup de témoignages qui disent qu’Africube leur rappelle les sauces d’antan. En termes de localisation, Africube est maintenant vendu au Benin et au Ghana depuis juillet 2018. Avant cela, nous avons réussi à nous implanter sur le marché malien, burkinabé. Nous sommes également présents aux Etats-Unis et en France. Ce sont encore des balbutiements mais nous y croyons !
Selomcrys : Que peut-on souhaiter à Africube pour la suite ?
Ayité Ajavon : Nous sommes une équipe alors, souhaitez-nous de parvenir à nos fins. Nous voulons qu’Africube ait l’opportunité d’être connus sur le territoire national et au-delà, faire consommer ce que l’on produit localement ! Un pays ne peut se développer si on ne consomme pas ce qu’on produit au niveau local. Tout ce qu’on consomme est importé, ça n’a pas de sens… Nous voulons qu’Africube soit adopté de tous comme leur bouillon cube maison…